jeudi 28 mai 2020

« LE DÉFI », ÉDITORIAL DE LAURENT MOULOUD DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR !




Le chiffre redouté du chômage au mois d’avril est tombé. Même s’il n’est pas une surprise, il glace le sang tant le défi économique et social à relever semble aussi crucial que gigantesque. Hausse vertigineuse. Selon les données publiées jeudi par Pôle emploi, 843 000 demandeurs supplémentaires – hors chômage partiel – se sont retrouvés le mois dernier en catégorie A (aucune activité), soit un bond de 22,6 %. Plus de 4,5 millions de personnes s’y pressent désormais. Du jamais-vu depuis la création de ces statistiques en 1996. Ces nouveaux effectifs sont constitués aux trois quarts de dizaines de milliers de CDD, vacataires, intérimaires venus de l’hôtellerie, de la restauration ou du monde de la culture, qui, confinement oblige, sont passés d’une activité réduite à plus d’activité du tout. Les précaires, une fois encore, sont les premiers à payer le prix fort de la crise.

Ne nous leurrons pas. Le pire est à venir. Le mois de mai sera aussi catastrophique qu’avril et précédera une déferlante de plans sociaux. Les prévisions font état d’un million de chômeurs supplémentaires d’ici à la fin 2020. Or, face à cette « catastrophe sanitaire et sociale », comme le redoutent les associations, le gouvernement joue au pompier pyromane. Il manœuvre au minimum, lâchant quelques concessions sans rien céder sur le fond. Les bénéficiaires des allocations-chômage ? Ils ont vu leurs droits prolongés, mais seulement jusqu’au 31 mai. La possibilité de les étendre sur un an, à l’image de ce qui a été accordé aux intermittents ? Hors de question pour l’instant. Les mesures de chômage partiel ?

L’État ne le financera plus à 100 % à partir du 1er juin, démultipliant ainsi les risques de licenciements. Le second volet de la réforme de l’assurance-chômage ? Décalé à septembre, il durcira encore les règles, occasionnant une baisse des allocations de 22 % en moyenne.
Ajouter de la misère à la misère. Joyeux programme. Face à une hausse historique du chômage, le gouvernement oscille entre demi-mesures et contre-mesures. Relancer la machine économique sans se soucier sérieusement du sort des plus précaires revient à écoper un navire éventré. Et à foncer vers un naufrage social dans lequel le gouvernement aura une bonne part de responsabilité.

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