mardi 28 avril 2020

« LE DÉNI », L’ÉDITORIAL DE JEAN-EMMANUEL DUCOIN DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR !



D’ordinaire, les temps de crise majeure réclament une délibération démocratique totale. Le plan de déconfinement annoncé par Édouard Philippe ce mardi à l’Assemblée nationale, crucial pour l’avenir du pays, échappera à la règle d’honneur de notre République. Un exemple supplémentaire parmi tant d’autres – sauf que celui-ci fera date. Alors que de lourdes incertitudes pèsent sur les mesures prévues pour l’après-11 mai, alors que nous assistons depuis des semaines à des contradictions, des louvoiements, des divergences et autres revirements et vraies-fausses annonces, le gouvernement s’apprête donc à dévoiler les conditions de « l’après » de manière expéditive et, pour tout dire, dans des conditions d’examen odieuses. À peine connu, le plan sera survolé, si peu discuté, et aussitôt voté. Tous les groupes parlementaires d’opposition réclamaient « plus de temps » afin d’étudier la stratégie proposée. Refus catégorique. Chaque jour qui passe assigne toujours plus le Parlement à un rôle de chambre d’enregistrement.
Nous ne savons si la date du 11 mai pour (mal) déconfiner le pays sera respectée, mais au moins une évidence s’impose : la démocratie, elle, reste confinée. Naviguant à vue entre impréparation et incompétence, sans parler de nombreuses décisions déplorables liées à l’alliance de l’expertocratie et de l’oligarchie politique, l’exécutif pousse ainsi les feux du déni démocratique. L’heure est pourtant bien trop grave pour se contenter de la nécessaire « urgence », qui ne saurait justifier la mise à l’encan des principes élémentaires.
Dans ces circonstances, comment s’étonner de l’ampleur de la défiance des Français ? Et comment ne pas comprendre que ces derniers considèrent, d’ores et déjà, la (possible) future application StopCovid comme un projet désastreux, piloté par des apprentis sorciers. La démocratie piétinée, d’un côté ; une confiance définitivement plombée, de l’autre. Est-il sérieux de s’en remettre, pieds et poings liés, aux gouvernants responsables de cette catastrophe ?


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