mercredi 22 avril 2020

« Hôtels », billet d’humeur du jour de Christophe Prudhomme


L'inventivité des gens qui nous gouvernent est sans limite pour masquer la pénurie de moyens et vendre des solutions dites "innovantes". La proposition de loger les personnes positives au coronavirus à leur sortie de l'hôpital fait partie de ces mesures. Regardons quel est l'objectif : éviter un retour à domicile précoce de personnes qui seraient encore contagieuses.

Deux questions se posent alors. Sachant que les personnes sont contagieuses avant même l'apparition des premiers signes, on en revient au problème de la réalisation massive de tests chez les individus ayant été en contact avec une personne atteinte. Oui, mais il n'y a pas assez de tests ! Donc, cette mesure ne permet pas d'être efficace pour éviter la propagation de l'épidémie, notamment au sein des familles. L'autre argument annoncé serait de libérer des lits pour soulager l'hôpital. Alors, là les bras m'en tombent car cet argument je le connais bien. C'est celui qui nous est servi depuis des années pour fermer massivement des lits sous couvert du soi-disant tout ambulatoire. Mais comme il est difficile de mettre les patients à la rue, surtout quand ils habitent loin ou que leur logement est inadapté, nous avons vu fleurir ces dernières années les projets "d'hôtels hospitaliers" construits en face de l'hôpital par le même groupe Accor qui est sollicité aujourd'hui.

C'est d'ailleurs ce qu'a imposé Martin Hirsch, le directeur général de l'AP-HP, avec son projet de nouvel hôpital au nord de Paris qui prévoit la fermeture de deux hôpitaux se traduisant par la suppression de 400 lits et de plus de 1 000 emplois. Mais pour régler le problème, il nous a vendu un hôtel hospitalier ! Ce monsieur que certains médias complaisants présentent comme le "commandant du navire qui a piloté avec succès le bateau au cœur de la tempête", ne poursuit en fait avec ce programme que son opération de destruction de l'hôpital public.

Par ailleurs dans cette opération, même si le groupe hôtelier s'en défend, elle lui permet de reprendre son activité, même si cela se fait à prix coûtant. Prix coûtant pour lui mais pas pour les finances publiques et les budgets hospitaliers !
Par ailleurs, les hôtels auraient été bien utiles dès le début de l'épidémie pour accueillir les populations les plus précaires, sans domicile ou hébergés dans les logements surpeuplés et parfois insalubres. Cela aurait permis par exemple d'éviter, comme dans mon département en Seine-Saint-Denis, qu'après la détection d'un cas dans une famille, nous nous retrouvions à hospitalier quelques jours plus tard plusieurs membres de cette famille.

Alors, assez de mensonges et de mesures gadgets. Ce dont nous avons besoin, c'est d'embaucher du personnel dans les hôpitaux pour rouvrir les lits dont nous avons besoin aujourd'hui et dont nous aurons encore besoin demain.
Dr Christophe Prudhomme


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