C’est un angle mort des études sur les violences
faites aux femmes. On ne sait pas, précisément, combien de femmes âgées en sont
victimes dans le couple. Les études sur le sujet ne prennent tout simplement
pas en compte les plus de 75 ans.
En conséquence, le phénomène est littéralement
invisibilisé, passé sous silence. Inconsciemment ou pas, la société se
conduit comme si la vieillesse protégeait les femmes de ce type de violences. On
sait que les personnes âgées peuvent être victimes, derrière les murs de leur
domicile ou dans leur chambre d’Ehpad, de violences physiques, de pressions
psychologiques, d’humiliations et même de restrictions alimentaires. Mais on ne
sait rien ou pas grand-chose des violences au sein même du couple.
Chez les femmes âgées, les circonstances qui
conduisent les victimes à ne pas être en capacité de quitter leur conjoint ou
de le dénoncer sont amplifiées. Économiques, d’abord. Beaucoup perçoivent le
minimum vieillesse et leur âge, par définition, ne leur permet pas un retour à
l’emploi. Pour elles, à cette précarité matérielle s’ajoute une pression
psychologique amplifiée. Dans nombre de milieux sociaux, les septuagénaires et
les octogénaires d’aujourd’hui se sont souvent mariées dans un temps et une
société encore plus marqués par le patriarcat et par le poids d’une éducation
traditionnelle, qui rend plus difficile, voire inconcevable, le fait de partir.
Pour certaines, c’est la continuité de ce qu’elles ont vécu au cours de leur
vie. La vieillesse des bourreaux n’émousse pas leur violence. Mais il serait
faux de croire que les femmes âgées victimes de violences ou tuées par leur
conjoint ne sont que des femmes victimes de violences qui auraient vieilli.
Pour les aider, rien n’existe, si ce n’est
l’engagement d’associations. Pourtant, il suffit de regarder ailleurs. Au
Canada, a été développé un réseau de maisons d’hébergement dont certaines sont
adaptées pour recevoir y compris des femmes en perte d’autonomie. Comme le
chantait Brel, tous les vieux ne s’endorment pas un jour et « dorment trop longtemps ». Il est
des vieilles que la pendule d’argent aurait dû attendre plus longtemps.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire