Pékin, Shanghai, Ürümqi, Nankin, Canton, Zhengzhou,
Wuhan, Chengdu, Chongqing… Depuis quelques jours, des dizaines de milliers de
personnes participent à des manifestations en Chine, malgré les risques
encourus qui peuvent se solder par des peines de prison à vie. S’il ne s’agit
que d’un mouvement parcellaire – pas coordonné mais simultané –, le simple fait
d’en signifier l’émergence à défaut de son ampleur témoigne d’une espèce de moment
« protohistorique » dont il
faut bien se garder de pronostiquer la suite.
À l’échelle du pays, ne caricaturons pas. Grèves et
protestations s’avèrent moins rares que ce que nous avons coutume de croire, vu
de chez nous. Néanmoins, ces rassemblements inédits depuis Tian’anmen en 1989
disent quelque chose du « symptôme » chinois.
Preuve, l’émergence de slogans contre le président Xi Jinping et le Parti communiste chinois (PCC) : « Xi Jinping,
démission », « Halte à la présidence à vie », « On n’a pas
besoin de tests mais de liberté », « Rendez-nous le cinéma, halte à la censure » ! Qui eût cru possible que des Chinois courageux en viennent à brandir des feuilles de papier blanc, tenues à bout de bras dans les rues, symboles d’une population qui ne peut pas toujours écrire ce
qu’elle a sur le cœur mais n’en pense pas moins ?
La gestion du « zéro Covid » est aussi
passée par là, dans un pays où la peur endémique des épidémies ne date pas de 2019. Notons, au passage, que la
levée des restrictions dans de nombreuses provinces a
provoqué une flambée de nouveaux cas. Des quantités certes négligeables,
comparées au 1,4 milliard d’habitants. Sauf que la sous-vaccination
des personnes âgées et le manque d’efficacité des vaccins nationaux incitent
les autorités à la prudence, tandis que 230 milliards d’euros ont été
dépensés en faveur de la politique des tests…
D’autant qu’un changement de paradigme est peut-être
en cours. Les colères du « zéro Covid », additionnées aux ras-le-bol préexistants, semblent toucher toutes les catégories sociales, que ce soit les
classes moyennes des grandes mégalopoles, incarnées par les jeunes, ou les
ouvriers des campagnes et des usines, comme à Foxconn. Incontestablement une
nouveauté, même si la contestation du pouvoir reste, à ce jour, très
embryonnaire.
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