Une gifle électorale pour le camp présidentiel. À l’heure où nous bouclons cette édition, les macronistes seraient numériquement tout juste en tête à l’Assemblée. Mais le chef de l’État pourrait se réveiller ce matin avec une majorité introuvable. C’est une défaite cinglante pour le président fraîchement réélu, dont le deuxième quinquennat s’annonce sous des auspices bien différents de 2017, où LaREM avait raflé à elle seule 308 sièges. L’arrogance du locataire de l’Élysée, l’indécente campagne confusionniste menée dans l’entre-deux-tours pour caricaturer les candidats Nupes en dangereux croque-mitaines se sont retournées contre lui. Avec plusieurs ministres et ténors hors-jeu, dont le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, l’édifice macroniste est sérieusement ébranlé, la monarchie présidentielle vacillante.
L’échec est d’autant plus cuisant pour le camp
présidentiel qui se présentait comme le meilleur rempart à l’extrême droite que
celle-ci, mauvaise surprise du scrutin, réalise une percée historique avec une
projection de 80 à 85 sièges… Une première depuis le rétablissement du
scrutin majoritaire à deux tours en 1988 qui avait fait disparaître le FN de
l’Assemblée malgré sa constante progression dans les urnes. Mais la gauche de
combat, qui entre en force dans l’Hémicycle, représente un adversaire autrement
plus redoutable pour le président. Afin de mettre en œuvre son programme de
casse sociale, Emmanuel Macron sera obligé de composer avec la droite LR, seule
force d’appoint disponible. Un tel attelage, désastreux pour les classes
populaires, clarifierait l’imposture du « en même temps ». La décomposition du paysage politique orchestrée par le président lui revient comme un boomerang.
La gauche s’impose comme la première force
d’opposition. D’une soixantaine de sièges occupés pendant le précédent
quinquennat, avec une projection entre 165 à 175 députés, l’Hémicycle se
repeint significativement aux couleurs de la Nupes avec de jeunes élus aux
profils sociologiques variés. Saluons ici la victoire de Rachel Kéké, première
femme de chambre à siéger au Palais-Bourbon !
Bien sûr, ce matin, beaucoup d’électeurs seront déçus
de voir la majorité échapper à la gauche. Le programme de la Nupes, avec le
Smic à 1 500 euros, l’augmentation des salaires, la retraite à 60 ans, l’allocation
de 1 063 euros pour les jeunes, la planification écologique ne
deviendront pas réalité dès cet été. Mais le scénario à l’italienne d’une
gauche disparue du paysage politique est écarté.
En dépit d’une opportunité exceptionnelle de
sanctionner le néolibéralisme pour seul horizon, et malgré des propositions
concrètes de la Nupes pour répondre aux urgences sociales et à la crise
climatique, plus d’un Français sur deux (54 %) est resté indifférent à ce
qui se jouait dimanche dans les urnes. À nouveau, c’est la frange la plus aisée
et la plus âgée, traditionnellement la plus favorable à la droite, qui s’est
davantage mobilisée. C’est là tout le défi des années à venir :
repolitiser une société désenchantée qui ne croit plus au pouvoir de la politique tant le
« there is no
alternative » a encrassé les consciences.
La performance de la Nupes, dimanche, inespérée il y a encore quelques
semaines, en est une première et prometteuse étape.
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