mardi 10 mai 2022

« Plus que jamais gagner la paix », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.

 


«La Russie peut perdre la guerre.» De plus en plus de chancelleries occidentales commencent à penser la suite des événements en Ukraine en ces termes. Au centre de ce nouveau paradigme, on trouve linfluence des États-Unis. Washington semble avoir fait fi de toute précaution et annonce des dizaines de milliards de dollars d’aides militaires supplémentaires. Le G7, de son côté, a ajouté un nouveau train de sanctions économiques pour isoler un peu plus la Russie. Un durcissement des États occidentaux qui les rapproche de plus en plus du statut de cobelligérants. Certes, la campagne d’Ukraine est plus compliquée pour la Russie que ce que laissait présager le rapport des forces au démarrage de l’invasion. L’armée russe a été contrainte de se replier au Nord pour se concentrer au Sud et à l’Est afin de sécuriser son contrôle de la mer d’Azov et tenter d’achever la conquête du Donbass. De là à dire que l’Ukraine va gagner la guerre…

D’ailleurs, que signifie gagner la guerre du point de vue des Occidentaux? La reconquête des territoires perdus depuis le début de loffensive russe? La réintégration des républiques autoproclamées du Donbass? Le retour de la Crimée dans le giron ukrainien? La capitulation de Poutine? Un changement de régime en Russie et en Biélorussie? Et pense-t-on vraiment que ces scénarios puissent se mettre en place sans réaction russe? Lors du défilé militaire du 9 Mai, Poutine a justifié loffensive en assurant que lUkraine préparait une attaque contre des séparatistes prorusses dans l’est du pays, voulait se doter de la bombe atomique et était soutenue par l’Otan, menace existentielle pour la Russie. Il a également assuré tout faire pour que l’horreur d’une guerre globale ne se répète pas.

Sans être obligé de le croire, il faut cependant voir dans cette déclaration une base possible pour ouvrir des négociations, à la condition que la Russie s’engage sur un cessez-le-feu. À l’irresponsabilité de Poutine, qui promet le feu nucléaire en cas de menace existentielle pour la Russie, faut-il ajouter l’irresponsabilité de miser sur une défaite militaire russe qui se produirait dans le cadre d’un conflit conventionnel? Ce genre de pari à haut risque est porteur dimmenses dangers pour le monde.

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