Il n’y aura ni satisfaction ni détachement. Encore
moins de regret devant un scrutin finalement moins serré qu’on avait pu le
redouter au soir du premier tour de l’élection présidentielle. Juste le
soulagement d’avoir empêché l’inacceptable qu’eût représenté l’accession d’un
membre du clan Le Pen au sommet du pouvoir dans notre pays. Mais nous le
savions, et beaucoup l’ont dit avant cette élection : le vote
par défaut pour un candidat de droite qui passe le plus
clair de son mandat à faire méthodiquement le lit du Rassemblement national avant de
se présenter comme son meilleur opposant au moment des élections ne pourra pas
tenir lieu de barrage la prochaine fois. La progression de Marine Le Pen d’un
second tour d’élection présidentielle à l’autre (+ 7,5 points par
rapport au duel de 2017) le raconte mieux que les mots : c’est maintenant, et non dans cinq ans, qu’il faut en tirer les leçons pour se dégager de
cette alternative mortifère, sinon l’extrême droite
sera au pouvoir en France dans peu de temps.
Dimanche, la digue a cédé dans un plus grand nombre de
départements qu’en 2017, dans lesquels Marine Le Pen recueille cette fois la
majorité absolue des suffrages exprimés. À commencer par les Ardennes, la
Meuse, le Vaucluse ou certains territoires d’outre-mer. Non que les idées de
l’extrême droite aient submergé ces terres, mais la colère et le dépit face à
la politique menée et au choix en présence y atteignent de tels sommets que
l’abstention et le vote blanc y font des ravages. D’ailleurs, il n’est guère
nécessaire de traverser les océans pour découvrir que nombre d’électeurs de
gauche convaincus ont refusé l’obstacle. Tout en redoutant plus que tout
l’élection de Le Pen, beaucoup n’ont pas pu aller contre leur conscience
profonde de la nocivité d’un nouveau mandat d’Emmanuel Macron et se sont
dérobés devant ce choix impossible pour eux.
Cette désaffection démocratique dont la faute revient
d’abord, par les choix politiques effectués depuis cinq ans, au président de la
République réélu dimanche et non aux électeurs – cela va mieux en le disant –
doit sonner l’alerte à gauche. La meilleure façon de conjurer le spectre de
l’extrême droite au pouvoir, c’est d’infliger le plus vite possible à Emmanuel
Macron le camouflet électoral qu’il mérite de recevoir. Le président ne perd
rien pour attendre, malgré sa reconnaissance tardive, dimanche soir, d’un vote
non d’adhésion à ses idées mais de « barrage à celles de l’extrême droite qui l’oblige pour les années à venir ».
Ce que l’élimination de la gauche a rendu impossible à
la présidentielle, les législatives qui viennent doivent permettre de le faire.
Ensemble, avec ses composantes, insoumise, communiste, écologiste, socialiste,
la gauche pèse autant que chacun des deux autres « pôles » de droite libérale et d’extrême droite.
En se portant candidat à la fonction de premier ministre, Jean-Luc Mélenchon,
fort de ses 22 % à la présidentielle, a fixé l’objectif. L’union des
forces de gauche sincère, loyale et respectueuse de chacune en est le moyen.
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