Ils n’auront pas mis longtemps à réapparaître sur le
devant de la scène. Face aux images terribles du drame ukrainien et aux
perspectives apocalyptiques que fait planer Vladimir Poutine sur l’avenir du
monde, les promoteurs de la « fermeté », voire de la riposte militaire, reprennent de la voix.
Mardi soir, répondant à l’invitation du philosophe Bernard-Henri Lévy, un large
spectre de personnalités politiques, dont Valérie Pécresse, Anne Hidalgo et
Jean-Michel Blanquer, se sont pressées à la tribune pour exprimer leur
solidarité et leur soutien au peuple ukrainien. Mais aussi instiller l’idée
que, face à la violence de l’invasion russe, seul le feu pouvait répondre au
feu. Et que toute autre option – disqualifiée par avance – relèverait de
la « naïveté », de la « faiblesse », si ce n’est de la « complaisance » ou de la « compromission » avec le maître du Kremlin.
N’en doutons pas : ce manichéisme des va-t-en-guerre, enivrés par l’exaltation lyrique de l’héroïsme des
autres, a toujours été la première étape des engrenages guerriers, ceux qui
mènent au pire, ceux qui étouffent les solutions à même d’épargner des vies et
de reconstruire la paix. Bernard-Henri Lévy jouait déjà les ministres de la
Guerre en Irak et en Libye, intarissable sur la nécessité d’y porter le fer,
indifférent aux années de chaos et de martyr qui s’ensuivirent. Il récidive
depuis les banquettes en velours d’un théâtre parisien, sommant l’opinion
publique de choisir son camp. Le sien représente évidemment celui du « bien », de la « liberté » et de « l’Occident » (« le meilleur endroit où être »), offrant à Vladimir Poutine
le miroir d’une rhétorique ethniciste et civilisationnelle (« eux » contre « nous ») dont le
dictateur russe aime user tout autant auprès de son peuple… Les deux font la paire.
Faire du conflit en Ukraine un choc des civilisations,
comme le défendent BHL et ses amis, ne peut qu’envenimer la situation. Et
démultiplier le risque d’une escalade des armes. Or, la Russie et ses quelque 6 000 têtes nucléaires n’est pas l’Irak de Saddam Hussein ou
la Libye de Kadhafi. Toutes les énergies et pressions doivent être mobilisées
pour pousser Poutine à un cessez-le-feu et ouvrir des négociations. Une
exigence qui n’a pas besoin des postures du bellicisme mondain.
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