Contresens, arguments erronés, dissimulation… Le
projet de réforme des retraites annoncé il y a quinze jours par Emmanuel Macron
réunit tous les ingrédients d’un véritable hold-up social. À commencer par un
revirement spectaculaire du président-candidat. En 2017, ce dernier martelait
sa position : au grand jamais il ne touchera à l’âge légal de départ fixé à 62 ans, tout
simplement parce que cette mesure est inutile économiquement. Cinq ans plus
tard ? Le voilà défenseur zélé d’un allongement progressif jusqu’à 65 ans au nom
de ce même argument économique. Ne cherchez pas la cohérence intellectuelle, il n’y en a pas.
Injustifiable sur la forme, la position du chef de
l’État est également injustifiée sur le fond. Emmanuel Macron, et d’autres avec
lui, épouse désormais le raisonnement alarmiste si cher aux libéraux : « Nous sommes dans une société qui vieillit, il est donc normal que nous travaillions plus, surtout
compte tenu de la nature des comptes publics. » Simple, mais faux. Déjà, le besoin de financement n’a rien du gouffre
qu’on nous dépeint. Au contraire. La branche retraite de la Sécurité sociale
est quasiment à l’équilibre. Et dans le privé, le régime des cadres et salariés
(Agirc-Arrco) affiche un excédent de 2,6 milliards d’euros. Aucune
urgence. Sur le plus long terme, tous les scénarios actent un recul du poids
des retraites dans la richesse nationale (lié notamment à la disparition des
baby-boomers). Dernière réalité occultée : repousser l’âge de départ génère des économies, mais également de
lourdes dépenses en chômage (qui se prolongent) et en invalidité (qui se multiplient avec le temps). Un gain budgétaire à somme
nulle, donc, et de gros dégâts humains.
En vérité, de cette réforme brutale et inutile,
Emmanuel Macron veut faire une arme à double tranchant. Électorale, tout
d’abord : en
reprenant les arguments de la droite, le candidat finit de siphonner les
soutiens d’une Valérie Pécresse à terre. Mais il donne également des gages aux
marchés financiers et aux vendeurs d’épargne privée, qui ont fait de la réforme
des retraites et de l’affaiblissement de notre protection sociale leur totem
favori. Un opportunisme politique et dogmatique que les Français, espérons-le,
n’oublieront pas de balayer le 10 avril prochain.
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