L’image avait ému à travers le pays. Des files d’étudiants devant les
associations de solidarité pour pouvoir se nourrir. Voilà où en est
l’université française. Voilà comment on traite les étudiants en France.
Évidemment, dans ces conditions, nombre d’entre eux se retrouvent en échec
scolaire. Ce mur qui se dresse devant toute une génération aurait dû alerter au
plus haut niveau, tant ces situations, inacceptables individuellement,
hypothèquent aussi l’avenir du pays.
Le président de la République n’a rien trouvé de mieux, il y a quelques
semaines, que de lancer devant les présidents d’université : « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, (…) dans un modèle beaucoup plus financé par l’argent
public que partout dans le monde. » Le problème ne serait pas le sous-investissement
social et matériel dans l’université mais le financement public et la gratuité ? L’un et l’autre sont pourtant la condition de l’accès du plus grand nombre aux
savoirs. On comprend que ce ne soit pas du goût du libéral Macron, qui a la
fâcheuse tendance à prendre l’entreprise pour un modèle universel.
C’est d’ailleurs ce que cachent ses propos. C’est bien un enseignement
supérieur à plusieurs vitesses que prépare l’exécutif. Déjà, en vingt ans,
la proportion d’étudiants inscrits dans le privé a doublé pour atteindre
1 sur 5. C’est énorme. À terme, grandes écoles (aujourd’hui
florissantes), universités d’élite financées par le privé (qui choisira les
formations) et universités publiques sous-dotées constitueront les trois
niveaux d’un système d’enseignement supérieur uniquement tourné vers la
compétitivité et les besoins du marché. La plupart des étudiants n’auront, dans
le meilleur des cas, accès qu’à une université publique au rabais et donc
incapable de remplir sa mission émancipatrice. On dira alors qu’elle est
inutile et qu’il faut finir de laisser le privé former les jeunes selon ses
besoins. Emmanuel Macron voit donc loin. Mais, l’idéal républicain, on en est
loin.
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