Total était au parfum. Elf aussi. C’était bien avant la fusion de ces deux
géants pétroliers, à l’aube des années 2000. En 1971, dans un document interne,
Total pointait déjà l’impact des énergies fossiles sur l’effet de serre. C’est
ce que révèle une étude retentissante publiée mercredi dans la revue Global
Environmental Change. Malgré la gravité des faits, Total va adopter la
même ligne de conduite inconséquente que son homologue états-unien Exxon. Le
mastodonte s’emploie d’abord à balayer les doutes quant aux conséquences « potentiellement
catastrophiques » de ses activités sur le climat. Puis se complaît à
nier ce qui devenait évidence, n’hésitant pas à décrier les travaux de
recherche des scientifiques.
L’entreprise a joué de tout son poids pour contrecarrer des réglementations
qu’elle jugeait trop contraignantes, en jouissant, à cet égard, de complicités
politiques. L’illustration de cette collusion politico-industrielle reste le
sabordage du projet d’écotaxe européenne, laquelle ne verra finalement pas le
jour. Elf et Total figurent alors au premier rang de ses détracteurs. Ils
trouveront un soutien de taille en la personne d’un certain Dominique
Strauss-Kahn, alors ministre de l’Industrie sous la présidence de François
Mitterrand. Le futur directeur du FMI sera à la manœuvre pour bloquer cet impôt
au sein des institutions européennes. La nature de cette connivence n’est pas
récente.
L’État français s’est
lui aussi vautré dans le déni, comme le rappellent les chercheurs. En 1968, un
colloque de la délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à
l’attractivité régionale (Datar) soulignait, déjà à l’époque, que « l’augmentation
du taux de gaz carbonique dans l’atmosphère » pourrait générer
une « modification globale du climat terrestre ». Tous
savaient donc et n’ont rien fait, les uns aveuglés par l’appât du gain, les
autres obnubilés par l’influence de la France à l’étranger via l’industrie
pétrolière. Comme si le sort de la planète était une question annexe. Ces
agissements portent un nom : écocide.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire