jeudi 16 septembre 2021

« Inacceptable aumône », l’éditorial de Cédric Clérin dans l’Humanité.



L’égalité des droits n’est pas contradictoire avec l’individualisation des situations. Ainsi de ce qui concerne l’allocation adulte handicapé (AAH). Il est en effet temps de mettre fin à une injustice sociale que l’on ajoute à l’injustice du handicap. Concrètement, aujourd’hui une personne handicapée se voit dans l’extrême difficulté et même souvent dans l’impossibilité de travailler. La société compense à juste titre cette injustice par une allocation de 900 euros. Ce n’est pas Byzance et sa revalorisation serait une juste revendication tant on ne peut pas laisser le marché faire grimper tous les prix et cantonner les minima sociaux à de pareils seuils. Ce n’est certes pas toujours la cohérence qui étouffe les libéraux. Mais avant cela, une injustice doit être réparée d’urgence : pour le calcul de l’allocation, le conjoint est pris en compte. Le faible montant peut donc se transformer en une aumône inacceptable. Pire, au-dessus de 2 200 euros gagnés par le conjoint, l’AAH est purement et simplement supprimée.

Ce qui pose des problèmes en cascade : d’abord, une telle mesure induit qu’un couple pourrait vivre décemment avec 2 200 euros par mois ! Qui peut croire ça ? Cette situation crée également une situation de dépendance de la personne handicapée vis-à-vis de son conjoint. Comme si la société créait les conditions de l’autonomie d’une part pour la supprimer de l’autre. C’est enfin permettre à des couples de vivre leur amour au grand jour plutôt que d’être obligés de se dissimuler sous peine d’être dans l’incapacité de subvenir à leurs besoins.

Il faut donc d’urgence déconjugaliser cette allocation. C’est si juste que même la Macronie, d’habitude si peu sensible à la justice sociale, semble encline à y répondre. Il faut maintenant aller au bout et satisfaire une revendication d’individualisation qui parle à l’ensemble du collectif national : c’est un enjeu d’émancipation individuelle que peut permettre la solidarité collective. Banco.

 

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