À La Courneuve, la foule
a balayé les doutes quant à sa tenue, pour un grand moment de rencontres, de
débats, de solidarité et de politique au sens le plus large.
Ils, elles l’ont fait. Une grande respiration après des mois comme en
apnée… Les milliers de personnes qui, depuis ce vendredi, sont arrivées à La
Courneuve ont redonné à la Fête un souffle nouveau. Sur le vaste espace devant
l’Agora, le lieu des débats du journal, un pique-nique géant le samedi midi
mêle jeunes et vieux, cheveux gris ou roses, bleus parfois, t-shirts, pulls
marins et chemises blanches. Tous les stands du Village du monde où l’on peut
se restaurer sont assaillis avec des files d’attente de dizaines de mètres.
Autant le dire, on doutait. Crise sanitaire avec ses contraintes ne serait-ce
que pour entrer à la Fête, pression de la droite et de l’extrême droite sur le
débat politique, gauche divisée. Le peuple de la Fête a répondu.
Des retrouvailles heureuses
Il y a Lucie, jeune assistante sociale, qui y vient depuis cinq ans. « C’est
une renaissance, c’est si bon de revoir des visages sans masques. » Ingénieur
et clown d’hôpital. Oui, oui. Pierre et Sylvia viennent de Nice. Ils retrouvent
à la fête leurs fils, Paul, et Corentin, qui vient d’obtenir son diplôme
de kiné et vit en Belgique. « On se retrouve à la Fête chaque année. » Il
fait beau, il y a partout des sourires, des rires et des chants, des checks et
des poignées de mains, des embrassades aussi, on se prend dans les bras. Des
retrouvailles heureuses, parfois empreintes d’émotion quand il arrive que la
maladie a frappé. Ce n’est pas si simple. Chacun sait ici que l’épreuve n’est
pas terminée. On en témoigne dans les débats. À l’Agora à propos du
télétravail. Dans un stand plus modeste avec les suites de la crise en termes
de santé mentale. On se dit ça va, ça va... ça veut dire qu’on est là.
Philippe Martinez face à Gabriel Attal
On est là, et comment, quand la foule déborde de l’Agora comme une onde qui
bout dans une urne trop pleine (pardon Victor Hugo) alors que l’économiste Thomas Piketty évoque héritages et
patrimoines. On est là, quand débute le débat attendu entre Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, et
Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement. Sans surprise les
débuts sont houleux mais l’échange a lieu. On entend au vol qu’en une heure et
demie de débat, Bernard Arnault, troisième ou quatrième fortune du monde aura
gagné dix millions d’euros…
On bavarde quelques instants plus tard avec Youssef. Il est étudiant en
informatique. Il vient d’Avion, dans le Pas-de-Calais, et il découpe des
oranges dans un stand pour les enfants. « Parce que, dit-il, si
on ne peut pas aider quelqu’un, on n’est pas humain. » Aider les
autres. C’est vrai pour toutes les associations qui sont chez elles à la fête.
Féministes, contre le viol ou simplement pour fournir aux femmes des tampons
gratuits. Pour l’ordre des avocats du barreau de Paris, ici pour la première
fois, « ça n’a pas été si facile », afin de faciliter l’accès au
droit des plus modestes…
« La banquise ne se rachètera pas sur Amazon »
« Ainsi s’éteint la démocratie sous une pluie d’applaudissements. » La banderole est
au fronton du stand des jeunes communistes du Val-de-Marne. Sur une des parois,
ils ont collé des bulles d’hommes et de femmes politiques, comme un florilège
délétère d’une pensée qui abandonne les lumières. « Quand j’entends le
mot violences policières je m’étouffe », de Gérald Darmanin. « On a
voté l’amendement des pédés », d’une députée LaRem à propos d’un texte sur
l’accueil des réfugiés. Il y en a des dizaines. Le texte de la Banderole vient
de Star Wars. « Nous l’avons pensé comme un
avertissement. » Un arrondissement de Paris en lance un autre : « La
banquise ne se rachètera pas sur Amazon »…
Devant la grande scène et avant le meeting politique et la prise de parole
de Fabien Roussel le secrétaire national du PCF, on témoigne du succès contre
le projet Hercule, de la situation des premières de corvée de Carrefour quand
le groupe supprime de nouveau des emplois, de la situation de l’hôpital.
« Non aux talibans, non aux talibans »
Et quelle force, quelle émotion dans les paroles d’une commandante kurde,
de ces femmes qui ont repris Kobané, et quelle colère dans les paroles d’une
réalisatrice Afghane qui fait scander à la foule, car il y a foule pour ce
moment et pour la prise de parole, « Non aux talibans, non aux
talibans »… C’est si bon de vous retrouver lance le candidat du PCF, qui va
dans la soirée débattre avec Valérie Pécresse. Chaud devant, là encore.
On ne savait que c’était possible, une telle Fête, là. C’est peut-être pour
ça qu’elle est magnifique, inespérée, avec ce public dingue. En l’inaugurant, le directeur de l’Humanité avait cité
Louise Michel, dans sa correspondance avec Victor Hugo -Tiens,
encore - « La révolution sera la floraison de l’Humanité comme l’amour
est la floraison du cœur ».
Sinon, pour ce qui est
de l’humanité face à l’univers, thème de la conférence samedi matin de
l’astrophysicienne Sylvie Auclair, on reste dans l’incertitude pour ce qu’il en
est des extraterrestres.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire