Bien évidemment, le suspense autour des nouvelles restrictions sanitaires,
dévoilées jeudi soir par Jean Castex, a mobilisé toutes les attentions. Rien de
plus normal. Et pourtant, qu’il nous soit permis de rappeler ici que ce
feuilleton sans fin des confinements, couvre-feux et autres cafouillages
vaccinaux de l’exécutif ne doit pas exonérer le pouvoir de regarder dans les
angles morts de cette interminable pandémie. Et notamment ce creusement
vertigineux des inégalités sociales qu’occasionnent la crise du Covid-19 et sa
gestion hasardeuse.
Parler, d’ailleurs, de crise au singulier est assez impropre. Le pluriel
conviendrait mieux tant elle est vécue de manière différente selon que l’on
soit riche ou misérable, pour paraphraser Jean de La Fontaine. Comme le
rappelle l’ouvrage paru ce jeudi et codirigé par la sociologue Anne Lambert,
les plus modestes restent de loin les plus exposés au virus et à ses
conséquences. Ce sont eux qui vivent dans les communes où la densité de
population est la plus forte, eux qui logent le plus souvent dans des
habitations surpeuplées, eux qui souffrent le plus de pathologies associées. Ce
sont les ouvriers et employés qui régulièrement continuent à travailler sur
site, et donc à prendre plus de risques. Eux aussi qui ont été les plus
concernés par les mesures de chômage partiel, la majorité des cadres pouvant
travailler à domicile. Eux enfin – à commencer par les intérimaires – qui
subissent la grande majorité des suppressions de postes. Une « explosion » des
inégalités de classe, souligne Anne Lambert, mais aussi de genre (les précaires
sont souvent des femmes) et de génération (les jeunes sont surreprésentés).
À l’heure où chacun
débat légitimement du bon dosage de confinement, on ne peut que constater que
cette crise d’inégalité et les drames humains qu’elle ne manquera pas
d’engendrer, sont totalement absents des radars gouvernementaux. Certains
ministres se gargarisent de faire du « sur-mesure » sanitaire,
évoquent une gestion « fine ». On ne peut que leur suggérer que
cette finesse concerne également et urgemment les conséquences sociales de la
pandémie.
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