mardi 2 février 2021

Covid-19. « En mobilisant tout le monde, on pourrait aller plus vite », soutient Christian Favier



Emilio Meslet

Alors que le virus circule encore beaucoup, le président communiste du Val-de-Marne constate une campagne de vaccination « chaotique » à laquelle les élus locaux ne sont que peu associés. Entretien.

Masques, tests et désormais vaccins : en première ligne, les élus locaux subissent les décisions souvent hasardeuses de l’exécutif. Parmi eux, Christian Favier, président du conseil départemental du Val-de-Marne. Alors que Sanofi, fleuron industriel de son territoire, est à la peine, le communiste déplore une campagne vaccinale trop lente et s’inquiète d’une reprise épidémique aux fortes conséquences sanitaires mais aussi sociales.

Très en retard sur la découverte d’un vaccin, Sanofi a annoncé la suppression de 400 postes dans la recherche. De quoi cette situation est-elle le signe, selon vous ?

CHRISTIAN FAVIER : C’est le résultat de décisions stratégiques de sacrifier l’investissement sur la recherche. On paye aujourd’hui les conséquences de ces choix financiers. L’État doit reprendre la main sur la situation, d’autant plus au regard des aides publiques dont Sanofi a bénéficié depuis des années. Il faut mettre fin à cette gabegie en allant vers un grand pôle public du médicament. On parle d’état d’urgence mais il n’y a pas de mesures d’urgence prises à l’égard de ces industries pharmaceutiques qui se sont moquées du monde en versant des dividendes aux actionnaires tout en ayant failli à leur mission.

À lire sur le sujet :  2 400 médicaments en pénurie : une proposition au Sénat pour une maîtrise nationale de la production pharmaceutique

Comment la campagne de vaccination se déroule-t-elle dans le Val-de-Marne ?

CHRISTIAN FAVIER : Le nombre de vaccins délivrés dans les centres est insuffisant : 5000 par semaine pour un département qui compte 1,4 million d’habitants et énormément de salariés du monde de la santé.

Que vous disent les habitants ?

CHRISTIAN FAVIER : À l’incompréhension s’ajoute la colère. Les centres ne peuvent pas réserver la vaccination aux habitants de la commune concernée. Via Doctolib, beaucoup de rendez-vous ont été pris par des personnes venant d’autres villes, voire d’autres départements. Ça suscite du ressentiment : les gens s’opposent alors qu’on devrait créer les conditions pour que tout le monde puisse se faire vacciner dans des délais raisonnables.

Cet article pourrait aussi vous intéresser : En France, les rendez-vous manqués de la vaccination

Que pensez-vous de la gestion de crise par l’exécutif ?

CHRISTIAN FAVIER : La méthode est très chaotique, avec des informations contradictoires. Pour les collectivités, c’est très difficile de travailler de cette façon. Le département a proposé que ses services mettent en place des unités mobiles pour aller vacciner les personnes âgées qui ne vivent pas dans des Ehpad et qui ne sont pas considérées comme prioritaires par l’État. On n’a pas été entendu. En mobilisant tout le monde, on pourrait aller beaucoup plus vite et nous sommes freinés par l’incurie de cet État à se procurer des vaccins.

Icon Quote Les départements ont été les seules collectivités à ne pas bénéficier d’aides directes de l’État.

La crise sanitaire a un impact très important sur la précarité. Qu’observez-vous dans votre département ?

CHRISTIAN FAVIER : Depuis mars, il y a eu 5 000 allocataires de plus, pour atteindre 47 000 aujourd’hui. On a repris les distributions alimentaires, en particulier de produits frais, en direction des associations. On sera aussi amené à refaire une distribution de masques réutilisables à tous les collégiens du Val-de-Marne après les vacances. Nous l’avons déjà fait deux fois au cours du premier trimestre. Ces mesures ont un coût important, d’autant plus que les départements ont été les seules collectivités à ne pas bénéficier d’aides directes de l’État. Il n’y a pas non plus eu d’aide particulière liée au RSA pour tenir compte de cette hausse due à la crise sanitaire. Dans le Val-de-Marne, 50 % des allocations versées relèvent du budget du département.

Quelle est votre marge de manœuvre sur les questions d’emploi et de relance économique ?

CHRISTIAN FAVIER : Elle est très faible car les départements n’ont plus de compétences en matière économique par des actions directes sur les entreprises. C’est du ressort de la région. Notre principal levier a été de maintenir notre politique d’investissement sur le département (entretien des routes, construction de collèges…). La situation économique est très difficile, notamment sur le pôle d’Orly. Il y a eu une fermeture totale de l’aéroport, puis une réouverture très limitée, avec des plans de départs volontaires. Les conséquences sont terribles aussi pour l’hébergement, la restauration, les musées… On essaye de trouver des dispositions pour préparer la reprise.

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire