On peut prétendre maîtriser les lois de la
biologie, il en est une qui défie toutes les connaissances humaines : celle du
hasard par lequel surviennent les mutations des virus. Êtres vivants ou non
– le débat scientifique reste ouvert –, ces organismes disposent
comme nous d’un matériel génétique, et il est dans leur nature de muter dans
une direction imprévisible, puisque cela dépend de l’avantage que leur
procurent ces « erreurs » de réplication de leur génome. C’est aussi implacable
qu’une loterie, à cette différence près que c’est l’humanité entière qui perd
ou qui gagne.
Ce qui arrive n’est donc pas une surprise.
Le moment où le virus allait se transformer en une nouvelle « souche » était
scruté de près par les scientifiques, après des milliers de mutations observées
ces derniers mois sans effet notable sur la pandémie. Il est encore trop tôt
pour évaluer avec certitude la dangerosité du « virus mutant », dont la
circulation est désormais attestée chez nos amis britanniques. Mais cette
variante du Sars-CoV-2 serait plus contagieuse, ce qui justifie les mesures
exceptionnelles d’isolement de la Grande-Bretagne vis-à-vis du continent. Aussi
drastiques ces dernières soient-elles, si la propagation du virus est
bien « hors de contrôle », comme l’a déclaré le ministre de la
Santé du royaume, il y a fort à parier que la mutation N501Y – c’est son
nom – s’est déjà frayé un passage, jusqu’à nous. Et qu’elle ne devrait
donc pas tarder à être détectée, comme c’est le cas au Danemark ou aux
Pays-Bas. L’inquiétude est, en tout cas, légitime à l’heure où les vaccins,
testés sur la souche virale des premières vagues de la pandémie, s’apprêtent à
inonder l’Europe.
Reste cette évidence : malgré l’exploit que constitue,
la mise au point d’un sérum contre une maladie inconnue il y a un an, la
recherche médicale ne peut pas précéder l’évolution du virus. Elle est
condamnée à le suivre à la trace dans ses mutations successives. Quelles que
soient les parades imaginées par les humains, la nature conserve un coup
d’avance, et ce simple constat nous impose le devoir de penser durablement le
monde avec le Covid.
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