jeudi 26 novembre 2020

Maradona le « Che du sport  »



Aurélien SOUCHEYRE

Florent LE DU

Ainsi surnommé par Fidel Castro, Maradona était un citoyen du monde engagé pour l’émancipation des peuples, de l’Amérique latine à la Palestine.

La « main de Dieu » a rappelé Maradona. C’est ainsi qu’il avait qualifié son but inscrit de la main lors de la Coupe du monde 1986. Le génial argentin était un fervent croyant. C’était aussi un citoyen mondial, engagé à gauche. En 1995, l’enfant des bidonvilles de la banlieue de Buenos Aires lance le premier syndicat mondial dédié aux footballeurs professionnels. Il concrétise depuis Paris ce « rêve » qu’il voulait « partager avec d’autres joueurs, pour que nous soyons solidaires de tous les footballeurs qui ont besoin de nous ». Cantona, Rai et Weah soutiennent le projet. À l’époque, les joueurs n’étaient pas représentés directement au sein de la Fédération internationale des footballeurs professionnels. Ce qui sera obtenu en 2001.

Tel n’a pas été le seul combat politique de cet enfant de la balle. Tatouage du Che sur l’épaule et de Fidel Castro sur le mollet, il rencontre le révolutionnaire en 1987. « On a passé cinq heures à discuter du Che, de l’Argentine, de Cuba », déclare El Pibe de Oro dans le documentaire que lui a consacré Emir Kusturica. Se rendant régulièrement sur l’île, il est présent aux funérailles de Castro, en 2016, et se dit « terriblement triste, parce qu’il était pour moi comme un second père ». « C’est le seul homme politique qu’on ne pourra jamais traiter de voleur, même si l’Amérique ne s’en prive pas », ajoute-t-il.

Le dribbleur fou a aussi soutenu avec ferveur la révolution bolivarienne d’Hugo Chavez. En 2005, il rejoint en train le sommet des peuples, organisé à Mar del Plata, en compagnie du président bolivien Evo Morales. « Je suis fier d’exprimer mon rejet à l’égard de cette poubelle humaine que représente Bush. Je veux que tous les Argentins comprennent que nous luttons pour la dignité », clame-t-il. En 2017 puis 2019, il se tient aux côtés du président Nicolas Maduro, et se revendique « soldat pour un Venezuela libre ». Il s’en prend directement à Donald Trump qui tente de déstabiliser le pays : « Les shérifs de la planète croient qu’ils peuvent nous piétiner parce qu’ils ont la bombe. Mais non, pas nous. Leur tyran de président ne peut pas nous acheter. »

Toujours du côté des démunis

Maradona disait qu’il était né dans un « quartier privé de Buenos Aires… privé d’eau, d’électricité et de téléphone ». Il en restera marqué à vie, toujours du côté des démunis. En 2014, il fustige le déluge de feu lancé par Tel-Aviv sur Gaza. « Ce qu’Israël fait aux Palestiniens est honteux. » Il ira jusqu’à dire : « Dans mon cœur, je suis palestinien », en 2018. La même année, alors que des footballeurs de renom soutiennent Bolsonaro au Brésil, il s’insurge et cri : « Ils ont volé la présidence à Lula ! » Un an plus tard, il se révolte devant le « coup d’État orchestré en Bolivie » contre Evo Morales, « une personne qui a toujours travaillé pour les plus pauvres ».

Lors d’un voyage à Rome, il s’ « embrouille » avec Jean-Paul II. « J’ai vu les plafonds recouverts d’or et j’ai entendu raconter que le pape se préoccupait des enfants les plus pauvres. Mais qu’il vende ses plafonds ! » Dans son pays natal, il a soutenu Nestor puis Cristina Kirchner, et enfin Alberto Fernandez, président qui a décrété trois jours de deuil national. En 1986, il avait donc marqué de la main contre l’Angleterre, avant de signer le « but du siècle » à la suite d’une longue chevauchée. « C’était comme si on avait battu un pays et non une équipe de football. Beaucoup de mômes argentins sont morts, ils les ont tués comme des petits oiseaux. C’était une revanche. Comment ça aurait pu être un simple match, bordel ! », s’était-il exclamé, hanté par la guerre des Malouines.

 

 

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