L’hôte de Matignon verse dans la banalisation du crime contre l’humanité. Sur le terrain sécuritaire, Gérald Darmanin drague aussi l’électorat de droite.
« Nous
devrions nous autoflageller, regretter la colonisation, je ne sais quoi
encore ! » La phrase n’a pas été prononcée par Marine Le Pen mais par
le premier ministre, Jean Castex, invité dimanche du JT de TF1. Celui-ci
considère tout retour sur le passé colonial comme un aveu de faiblesse face au
terrorisme. Devant plus de 10 millions de téléspectateurs, il a tenu à
dénoncer « toutes les compromissions qu’il y a eues pendant trop
d’années » et les « justifications à cet islamisme radical ». En
liant les volontés d’interroger le passé colonial et l’assassinat d’innocents
par des fanatiques religieux, le chef du gouvernement donne raison aux
identitaires. Bien loin des déclarations d’Emmanuel Macron, qui, en 2017,
jugeait la colonisation comme un « crime contre l’humanité ».
Une unité mise à mal
Jean Castex reprend d’ailleurs une vieille
antienne de la droite qui estime que toute critique du passé colonial de la
France relève de « l’autoflagellation ». Un positionnement qui n’est pas sans
rappeler celui de Nicolas Sarkozy, fervent opposant à la « repentance
permanente » et chantre en 2005 du « rôle positif » de la colonisation. Mais la
déclaration du premier ministre vise surtout à flatter des électeurs très à
droite. Dans ce sillage, le chef du gouvernement s’en est pris à une partie de
la gauche, qui se retrouve accusée, depuis plusieurs semaines, de tous les
maux : « C’est fini, plus aucune complaisance d’intellectuels, de partis
politiques, il faut que nous soyons tous unis sur la base de nos valeurs, sur
la base de notre histoire. »
L’hôte de Matignon a demandé à la
« communauté nationale » d’être « unie et fière » de ses « racines », de son
« identité » pour mener le « combat idéologique » contre le terrorisme. Une
unité mise à mal pourtant par ses propos sur la colonisation, en particulier au
moment où les questions mémorielles hantent le débat public. « Une nation se
grandit quand elle assume et éclaire les pages les plus sombres de son
Histoire. La France doit faire face à son passé colonial (…). Pour être fidèle
justement aux idéaux qui fondent notre République », a réagi le député européen
Raphaël Glucksmann, qui appelle le gouvernement à se montrer à la hauteur
des enjeux, sans alimenter les divisions et la confusion ambiante autour de ces
sujets délicats. « ê tre uni et fier c’est pouvoir regarder notre histoire avec
esprit critique», a également rappelé le porte-parole d’Attac, Raphaël Pradeau.
Dissolution d’associations
Jean Castex, lui, entend bien donner des gages par les
actes. Il a ainsi annoncé la future dissolution de plusieurs associations, sans
préciser lesquelles, ni les éléments accablants ou les fondements juridiques
justifiant leur fermeture. « Il faut attaquer le mal à la racine, (…) ils
s’attaquent à des associations paravents, à des fausses mosquées, ils forment
des écoles clandestines, ils utilisent les réseaux sociaux, tout cela est au
cœur de notre stratégie », a ajouté le chef du gouvernement. Son ministre de
l’intérieur Gérald Darmanin a, quant à lui, précisé dans la Voix du
Nord les contours du fameux délit de « séparatisme ». Ainsi, les
personnes qui refusent de se faire soigner par « une femme » risqueront jusqu’à
cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Cette sentence
s’appliquera aussi pour « toute personne ou groupe qui voudra faire pression
sur les agents des services publics ou qui refusera l’enseignement d’un
professeur », a-t-il indiqué. La loi sur le séparatisme devrait arriver en
janvier à l’Assemblée nationale après une présentation en Conseil des
ministres, le 9 décembre.
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