Le président a présenté mercredi soir une série de
nouvelles mesures dont l’entrée en vigueur d’un couvre-feu entre 21 heures
et 6 heures, à partir de samedi, en Île-de-France et dans huit métropoles,
pendant au moins quatre semaines.
« L’heure
est grave. » Avant l’intervention du président de la République
mercredi soir, sur TF1 et France 2, son entourage, autant que le gouvernement,
n’a pas manqué de marteler ce message pour préparer les esprits aux mesures
drastiques annoncées par Emmanuel Macron, en particulier le couvre-feu. Après
les derniers couacs avec les élus locaux et face à une opposition qui hausse le
ton sur les incohérences du discours gouvernemental, le chef de l’État a choisi
de reprendre la main dressant dès les premières minutes de son interview le
tableau d’une « situation préoccupante ». Laissant de côté
l’allocution solennelle depuis le château, Emmanuel Macron n’a pas pour autant
endossé son costume de chef de « guerre » ni renoué avec le ton martial des
débuts du confinement. L’exercice s’est voulu « pédagogique » : « Nous
n’avons pas perdu le contrôle, nous sommes dans une situation qui est
préoccupante et qui justifie que nous ne soyons ni inactifs ni dans la panique.
Nous avons appris de la première vague », a-t-il assuré.
Le virus présent « au moins jusqu’à l’été 2021 »
Distillée depuis plusieurs jours,
l’information a été confirmée mercredi soir par Emmanuel Macron. Un « couvre-feu » va
être instauré entre 21 heures et 6 heures du matin pour quatre à six
semaines, dès ce samedi, dans huit grandes métropoles : la région Île-de-France
dans sa totalité, Grenoble, Lille, Lyon, Aix-Marseille, Montpellier, Rouen,
Saint-Étienne et Toulouse. « On fait ça pour freiner la diffusion du
virus, protéger les plus vulnérables, ainsi que notre système de santé, a
justifié le chef de l’État. L’idée, c’est de limiter les moments
de convivialité. Pour cela, oui, le couvre-feu est une mesure pertinente. » L’objectif
chiffré est de faire retomber le nombre des nouveaux cas quotidiens « entre
3 000 et 5 000 », contre les « 20 000 » mesurés
actuellement et de faire en sorte que les patients Covid « ne dépassent
pas 10 à 15 % d’occupation des lits en réanimation ».
Concrètement, ce couvre-feu va entraîner
de fait la fermeture de tous les restaurants, bars, cinémas, théâtres et autres
lieux culturels ou festifs, après cet horaire désormais fatidique de
21 heures. Mais, a tenu à préciser Emmanuel Macron, « on va
continuer à travailler, et nos enfants vont continuer d’aller à l’école. Notre
pays a besoin de ça. Pour celles et ceux qui rentrent du travail après
21 heures ou travaillent de nuit, il y aura des autorisations. Il n’y aura
pas une interdiction de circuler entre 21 heures et 6 heures, mais
une stricte limitation. Avec des contrôles et des amendes, de 135 euros et
de 1 500 euros en cas de récidive ».
Pour permettre la mise en place de ce
couvre-feu, l’état d’urgence sanitaire va être rétabli en France dès ce
vendredi à minuit. Pour ce faire, un décret a été examiné mercredi matin par le
Conseil des ministres. Pour mémoire, cet état d’urgence sanitaire avait été mis
en œuvre en France, au plus fort de la crise, à partir du 23 mars, avant
d’être levé le 10 juillet.
Pour le reste du pays, qui n’est pas placé
en zone d’alerte maximale, Emmanuel Macron a appelé à une « remobilisation
collective », et à un respect plus strict des gestes barrières. « C’est
une discipline, un réflexe à prendre », a-t-il dit. Il a invité aussi les
Français à aérer « 10 minutes trois fois par jour » leurs logements et à
limiter « à six le nombre de personnes à table ». « C’est
la règle dans les restaurants, il faut l’élargir. »
Reconnaissant qu’il y avait eu « des
vraies difficultés » sur les tests, avec des « délais trop
longs », Emmanuel Macron a remis sur la table ce qui serait la stratégie
française pour tenter de « vivre avec le virus », qui sera
présent « au moins jusqu’à l’été 2021 » : « tester,
alerter, protéger ». Pour que ce nouveau triptyque fonctionne mieux que le
précédent, le président de la République compte sur « les tests antigéniques »,
aux résultats plus rapides que les PCR, une nouvelle application de traçage,
baptisée Tous AntiCovid, ou un contrôle renforcé des « séjours
d’isolement ».
Deux ou trois jours de télétravail
Emmanuel Macron a également tenté de
rassurer notamment les petites entreprises des secteurs sinistrés qui ont
multiplié les actions ces derniers jours, promettant « des dispositifs
supplémentaires ». Outre le chômage partiel à 100 % pour
l’employeur « réactivé pour tous ces secteurs », ou encore le fonds
de solidarité élargi, le chef de l’État a promis une « concertation
locale afin d’améliorer la réponse économique » dès vendredi. En
revanche, il n’a pas pipé mot sur les salariés au chômage partiel dont les
revenus ont été amputés, selon une étude de l’OFCE parue en mai, en huit
semaines de confinement de 470 euros en moyenne. Il a toutefois reconnu
que « si sur le plan sanitaire, (cette crise) frappe davantage les
milieux modestes (…), sur le plan économique et social, celle-ci est aussi
inégalitaire, car les emplois détruits sont ceux en CDD, en intérim ».
Les nombreuses associations de solidarité
ont vu les demandes exploser. Selon le Secours populaire, près de
1,3 million de personnes ont été aidées par l’association pendant les deux
mois du confinement. Parmi elles, 45 % étaient alors inconnues du Secours
populaire. Les acteurs de la solidarité avaient appelé, à la veille de la
Journée de lutte contre la misère, le 17 octobre, à une hausse des minima
sociaux. Une demande refusée par le président de la République qui a
renouvelé les aides exceptionnelles du printemps dernier. « Pour les bénéficiaires
du RSA et des APL, une aide exceptionnelle de 150 euros, plus
100 euros par enfant comme au printemps » sera mise en place. « Ce
qui permettra d’aller entre 100 et 450 euros, ce qui est plus qu’une
revalorisation », a-t-il poursuivi. Droit dans ses bottes, Emmanuel Macron
en a profité pour vilipender la proposition de ceux au plus près du
terrain. « Je tiens aussi qu’on ne perde pas nos fondamentaux : la
lutte contre la pauvreté par le retour au travail. Plus on hausse les
minima sociaux, plus on retarde le retour au travail. »
Interrogé sur le télétravail, Emmanuel Macron a rejeté
l’idée d’une règle nationale, tout en développant l’idée que « dans un
bureau où il n’y avait pas de contact avec le public, on va inciter les gens à
faire deux à trois jours de télétravail par semaine ». Cela suppose, a-t-il
ajouté, qu’ils soient « négociés dans les branches au plus près de
l’entreprise ».
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