La stratégie de l’autoproclamé président
divise l’opposition. De nombreux députés cherchent le dialogue national plutôt
que la confrontation.
« De manière unanime, nous avons décidé de ne pas
participer à la fraude électorale organisée par le régime de (Nicolas) Maduro »,
ont annoncé 27 organisations vénézuéliennes d’opposition. Les signataires
dénoncent l’absence de « processus électoral ouvert, qui garantirait le
respect de la volonté souveraine du peuple », et ont rappelé leur « soutien » au
chef de l’opposition Juan Guaido. En conséquence de quoi elles se sont
prononcées pour le boycottage des élections législatives convoquées le
6 décembre prochain. L’autoproclamé président Juan Guaido avait déjà donné
le ton dans un tweet en écrivant que « cette nouvelle farce est
condamnée à l’échec », appelant l’opposition à « rester unie » pour
mettre fin, avec l’aide internationale, « à la tragédie entraînée par
la dictature ». Cette déclaration masque mal la réalité de la situation et
surtout l’état de l’opposition, dont la stratégie est en échec.
L’Assemblée nationale est actuellement présidée par Juan Guaido, qui
considère comme illégitime la présence au pouvoir de Nicolas Maduro et s’est
proclamé en janvier 2019 président par intérim du Venezuela. Sur sa lancée, et
conseillé directement par le département d’État américain, il pensait emporter
la mise à la faveur d’une tentative de coup d’État fomentée le 1er mai de
cette même année. Las, celle-ci a lamentablement échoué. Tout comme les
tentatives de reprendre la rue, en espérant profiter d’incidents pour mettre en
accusation le pouvoir chaviste. Mais là encore, les Vénézuéliens ont commencé à
se détourner d’une opposition qui apparaît plus préoccupée par ses propres
intérêts que par ceux du peuple. Pour beaucoup, l’activisme international de
Juan Guaido semble plus s’inscrire dans une spoliation directe et totale des
biens de la république du Venezuela - avec l’aide des pays occidentaux - que
dans une tentative pour sortir le pays de la crise où il se trouve. Dernier
exemple en date, le tribunal de commerce de Londres a refusé de restituer à
Caracas les 30 tonnes d’or gardées en Grande-Bretagne, sous prétexte que le
seul président légitime serait… Juan Guaido. Idem pour les milliards de dollars
vénézuéliens entreposés dans des banques occidentales. Quant au pétrole, il est
évidemment l’objet de toutes les convoitises, à commencer par les États-Unis.
Entre un Maduro soucieux de l’indépendance de son pays et un Guaido qui ne
saurait rien lui refuser, Donald Trump a choisi.
C’est d’ailleurs le représentant spécial américain pour le Venezuela,
Elliott Abrams, qui s’est chargé de donner la ligne de conduite aux partisans
de Guaido en affirmant que les États-Unis allaient renforcer les sanctions
contre Caracas et laissaient entendre que les élections de décembre ne seraient
pas libres.
Tout cela a abouti à un début de fragmentation de cette opposition. Un
certain nombre de députés, bien qu’opposés à Nicolas Maduro, ne partagent pas
les visées de Guaido, demandent le renouvellement des directions de leur parti
et entendent s’inscrire dans une sortie de crise vénézuelo-vénézuelienne,
c’est-à-dire ouvrir un véritable dialogue entre toutes les parties quand
Washington et ses affidés ne veulent que l’affrontement et l’intervention
extérieure.
Les partisans de Guaido font feu de tout
bois, intriguant pour bloquer toute avancée, comme cela a été le cas avec le
renouvellement du Conseil national électoral, forçant ainsi le Tribunal suprême
de justice (TSJ) à procéder à des nominations puis dénonçant un coup de force.
L’actuelle législature, dominée par l’opposition, arrivera à son terme le
5 janvier 2021.
Pierre Barbancey
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