Et si Gérald Darmanin avait raison ? À son insu, et contre ce qu’a
réellement voulu dire le ministre de l’Intérieur, on peut parler à coup sûr
d’un « ensauvagement d’une partie de la société » dont il est,
depuis la position qu’il occupe au gouvernement, plus qu’un témoin privilégié :
un acteur à part entière, à sa manière et à sa mesure. On n’évoquera pas
seulement ici les faits concernant ses rapports passés avec une plaignante qui
constituent, pour ce qu’il en a reconnu lui-même et quelle que soit la
qualification qu’en retiendra la justice, une déclinaison personnelle du thème
de la loi du plus fort. Mais il est difficile de ne pas relever la cohérence
entre la politique conspuée de toutes parts pour son iniquité dont Gérald
Darmanin est l’instrument constant au gouvernement depuis maintenant trois ans,
d’abord à Bercy puis maintenant à Beauvau, et l’impudeur incroyable de cette
promotion et, désormais, de ses déclarations.
Or, comment mieux mesurer l’« ensauvagement » d’une société, sinon au degré
de régression où elle se trouve entraînée quand la notion d’égalité cède le pas
au triomphe de la force sur le faible, mais encore et surtout à la manière sans
complexe ni scrupule qu’a le puissant de dominer ? Depuis trois ans, le mépris
pour celui qui est regardé à tort ou à raison comme le faible - pauvre,
ouvrier, chômeur, femme, immigré ou descendant d’immigré - est devenu la
marque de fabrique du macronisme, au point de contraindre le président de la
République à de fréquents mea culpa. Sans résultat, car ce n’est pas simplement
sa personne qui est en cause, mais le fond de sa politique : cadeaux aux plus
riches, baisse des APL, sanction des chômeurs, 49-3 sur les retraites, violences
policières contre les manifestants et dans les quartiers, etc.
Alors que la crise sanitaire exacerbe les
inégalités, les propos du ministre, qui fleurent bon l’extrême droite, n’ont
d’autre but que de faire croire que l’origine des maux se trouve au cœur des
milieux populaires. Une manière de dédouaner la sauvagerie du capitalisme.
Diviser pour mieux régner… Tandis que la société attend plus de justice, le
gouvernement prépare un tour de vis sécuritaire.
Par Sébastien Crépel
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