mercredi 13 mai 2020

« SOUS INFLUENCE », L’ÉDITORIAL DE LAURENT MOULOUD DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR



Ne nous berçons pas d’illusions. Aucune unanimité politique n’adviendra lorsqu’il s’agira de tirer les leçons politiques de cette crise sanitaire inédite. La remise en cause des dogmes économiques et des modèles de production, la revalorisation de ces « petits » métiers si grands, le développement des services publics… Toutes ces évidences du moment, porteuses de transformations profondes et partagées par une majorité de Français, seront farouchement combattues par le camp libéro-conservateur. Lui rêve d’une sortie par la droite, d’un retour illico au business et à son illusoire ruissellement, le tout payé par un nouveau recul des droits des salariés et un État réduit à la portion congrue. Cette machine à régresser s’attaque déjà au temps de travail et au Smic. Elle va continuer à faire feu de tout bois, n’en doutons pas, s’accommodant sans peine des promesses présidentielles de lendemains sociaux qui chantent.

Car, face à la crise, le pouvoir macroniste n’est pas un rempart. Il est sous influence. Alors que la lutte contre la pandémie a souligné l’engagement exemplaire des fonctionnaires, on découvre que Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, s’est doté depuis 2017 d’un directeur de cabinet de choc, en la personne de Christophe Kerrero, qui siège également au conseil scientifique de l’Ifrap, fondation ultralibérale qui milite depuis toujours pour une réduction massive des effectifs de fonctionnaires ! Servir l’État et en souhaiter l’affaiblissement ? En Macronie, c’est possible. Et même recommandé.


Dans son plan choc, l’Ifrap estime que la fin du confinement « marque la fin de la politique unique d’enseignement pour tout le territoire ». La fondation recommande «  de la flexibilité et des expérimentations locales », invite l’éducation nationale «  à devenir régionale ». Jean-Michel Blanquer, lui, affirmait encore ce week-end vouloir  « moderniser le système éducatif » en travaillant avec les collectivités locales sur  « l’articulation scolaire et péri­scolaire ». Manière polie de suggérer un nouveau désengagement de l’État. La convergence de vue entre Blanquer et son directeur de cabinet est donc évidente. Sur la forme, ce n’est pas surprenant. Sur le fond, c’est très inquiétant.

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