Et soudain, le surgissement de l’événement imprévisible… Il a donc fallu attendre des semaines et de longs jours de quiproquos et de polémiques, puis le début du débat parlementaire, pour connaître – enfin – la vérité. Pour ne pas dire l’arnaque, pensée, voulue et relayée par les principaux éditocrates de notre cher et beau pays. Souvenez-vous. Peu après la présentation par la première sinistre du projet de loi de réforme des retraites, qui constitue une sorte de clef de voûte du quinquennat de Mac Macron II sans laquelle tout pourrait s’effondrer autour de lui, nous avions entendu cet argument: «Pas de retraite en dessous de 1200 euros.» Combien de ministres et autres thuriféraires ont-ils répété cet «élément de langage», jusqu’à y croire eux-mêmes sans doute, comme si défilaient sous leurs yeux des paysages imaginés servant une unique cause: convaincre le bon peuple, forcément crédule et prêt à gober n’importe quoi. Sauf que l’arnaque était là, nichée dans l’énoncé. La pension à 1200 euros brut minimum ne concerne que… 0,002% des salariés, avec une carrière complète au Smic ! Précision : en toute logique, parmi les 20% des retraités les plus pauvres, 9 sur 10 n’ont pas eu une carrière complète. Vous avez bien lu.
Au fond, tout s’explique dans cette
rhétorique «mobilisatrice» de la Macronie : voler deux années à tous les
travailleurs et travailleuses, en moyenne 36210 euros par personne, et
augmenter de moins de 100 euros une personne sur 50000. Joli calcul. Au
résultat tangible: 93% des Français rejettent son projet. Équilibre, justice,
progrès: derrière les mots de la première sinistre, une entreprise de
communication. Appelons cela le «service avant-vente». Nous imaginons, sous les
lambris de la République, les soirées à phosphorer pour trouver le slogan passe-partout.
Décryptons-le sommairement. Équilibre: contraindre les citoyens à travailler
plus longtemps afin de soi-disant «combler» un déficit qui n’existe pas, ou
pas vraiment. Justice: toutes les classes populaires – l’ultramajorité de notre
société – travailleront deux années de plus pour financer les sympathiques
longues années de retraite à profusion des plus privilégiés. Progrès: le
minimum retraite à 1200 euros. Nous y voilà.
Tromperie totale. Même le montant a été
avancé comme un mensonge. En réalité, du moins pour ceux qui sont concernés, il
s’agit de 1 193 euros brut, donc 1150 euros net…
En d’autres occasions, nous aurions pu
en rire. L’affaire s’avère trop sérieuse pour sombrer dans la désinvolture.
Prenez l’ineffable Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, pris en
flagrant délit de mensonge originel et dénoncé publiquement, comme ses
collègues à portefeuille, par l’économiste Michaël Zemmour en direct dans la
matinale du 7 février de France Inter – notons au passage la «déontologie» à géométrie
variable de la co-présentatrice Léa Salamé. Interpellé un dimanche matin sur
les mêmes ondes, mais par un autre présentateur, M. Véran fut dès lors mis au
pied de ses contradictions. Plusieurs jours après, Léa Salamé devait admettre
l’approximation coupable, sans aucune vérification ni travail en profondeur,
reconnaissant finalement que «même nous, journalistes, on doit balayer devant
notre porte». Dont acte. Question: le mensonge ainsi dévoilé l’aurait-il été
sans l’intervention salutaire de Michaël Zemmour? Il y eut d’ailleurs plus
grave. Selon l’économiste, avant que le débat parlementaire ne débute, «les
députés étaient privés des données du débat», puisque le gouvernement avait
sciemment omis de présenter aux élus les statistiques, pourtant connues, qui
leur auraient permis d’estimer l’impact dudit projet, singulièrement sur les
prévisions de croissance et l’emploi des seniors. Il ajoutait: «L’étude
d’impact ne disait pas qu’environ une femme sur quatre serait concernée par un
décalage de deux ans pour une pension quasi inchangée.» Avant de préciser: «Les
chiffres présentés par l’exécutif, ou au contraire absents, étaient
systématiquement sélectionnés non pas pour éclairer la réforme, mais pour en
faire la réclame.» Au matin du mercredi 15 février, toujours sur France Inter,
le ministre en charge, Olivier Dussopt, des trémolos dans la voix, dut
finalement tout admettre en bloc. En y mettant les formes. Trop tard: l’homme
fut pathétique. Ce n’était plus le surgissement de l’événement imprévisible, mais
bien le surgissement de l’événement nécessaire…
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