Il y aurait presque un paradoxe. C’est au moment où le
pouvoir d’achat recule à des niveaux inédits que des centaines de milliers de
salariés décident de faire grève, donc de réduire encore un peu plus le montant
porté sur leur fiche de paye à la fin du mois. Il faut que la colère soit
grande pour faire ce choix. Ceux qui manifestent – postiers, techniciens,
secrétaires, infirmiers, cheminots, professeurs, chômeurs – n’arrivent pas
ou n’arrivent plus à joindre les deux bouts. S’ils donnent de la voix en ville
comme à la campagne, c’est pour dénoncer un quotidien de plus en plus
difficile. Ils en ont marre de vivre une existence dans laquelle, même sans
aucune fantaisie, le découvert n’est jamais loin. Ce qu’ils veulent, c’est
simplement gagner un peu plus pour vivre normalement.
En se mobilisant, ils posent, qu’ils en aient
conscience ou non, deux questions centrales. La première est de nature
démocratique. C’est la réaffirmation du droit de grève. Le droit qu’ont les
salariés de cesser le travail lorsqu’ils ne sont pas écoutés. Contrairement à
ce qui est raconté par le gouvernement sous les applaudissements de la droite
et de l’extrême droite, une grève, ce ne sont pas des gens égoïstes qui en
empêchent d’autres de travailler. Une grève, ce sont des travailleuses et des
travailleurs qui ne se battent pas seulement pour eux- mêmes mais pour
l’amélioration du sort de leurs collègues, et du monde du travail dans son
entier. Et c’est la seconde question qui émerge, celle du partage de la
richesse. Cela passe, pour commencer, par l’indexation des salaires sur
l’évolution des prix, donc l’augmentation du Smic et des minima sociaux.
Tout le monde a compris que, pendant que le
gouvernement exhorte à la « sobriété », les
patrons et les actionnaires engrangent sur tous les tableaux : sur l’augmentation des prix à la consommation, sur la spéculation et
sur la surexploitation du travail. Et c’est bien pour poursuivre dans cette logique, la même qui conduit à vouloir rallonger le temps de travail avant de pouvoir partir en retraite,
que le gouvernement et le patronat cherchent à opposer les gens entre eux.
S’ils y réussissent pour une part, il n’en reste pas moins que ceux qui ont
envie d’en découdre avec ce système au service exclusif des riches et des
puissants sont de plus en plus nombreux. Vont-ils se retrouver et converger
dans l’un de ces grands mouvements d’automne qui emporte tout sur son passage ? C’est la grande peur du patronat.
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