mardi 23 août 2022

« L’essence du macronisme », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.

 


À en croire les magazines, Emmanuel Macron est le président français qui travaille le plus. «Réunion à 23h30, minuit, une heure du matin même», et pas forcément sur des dossiers urgents. Ses collaborateurs ou les personnels du château? Ils doivent suivre Marche ou crève à l’Élysée, en quelque sorte. Derrière cette anecdote se révèle toute la conception de la société et des rapports sociaux d’Emmanuel Macron. L’ambition du chef de l’État est de construire une société au service des gagnants. Et ceux qui ne gagnent pas? La responsabilité de «l’échec» leur est systématiquement renvoyée. «Ils ne font pas assez d’efforts et profitent d’un système social trop généreux», nous explique-t-on. Emmanuel Macron ne manque d’ailleurs jamais de vanter et de s’inspirer de ce qui se fait de pire ailleurs en matière de social. Modèles allemand, suédois ou canadien sont agités et mis en avant pour tenter de faire oublier que l’objectif est un retournement complet de l’idée même de protection sociale. Il s’agit de faire accepter l’idée que le «moderne» consisterait à prendre des risques. Ce serait «traverser la rue» afin de devenir «économiquement autonome» de tout dispositif social.

Pour masquer la violence d’une telle logique, le président affirme que «verser une allocation ne suffit pas (), ce qu(il veut), cest que chacun sen sorte et retrouve sa dignité grâce au travail». Chômeurs, précaires, retraités, tous sont soumis au logiciel néolibéral: plus de pouvoir donné aux forces du marché, moins de dépenses publiques et sociales, afin de baisser les prélèvements sur les «premiers de cordée».

Ni les crises – gilets jaunes, Covid, guerre – ni le fameux «quoi quil en coûte» nont changé lessence du macronisme. Le néolibéralisme demeure au cœur des décisions, à la fois sous son aspect financier, sous la priorité quil donne aux marchés et aux entreprises, et enfin par sa faculté de renvoyer chacun à son propre sort. Une société où le devenir de tout individu est indexé sur sa réussite économique sur le marché, sans filet de sécurité ou alors réduit au minimum possible pour les perdants. C’est précisément la question d’une société bâtie sur des principes à l’opposé de ceux-là et des moyens de la construire qui sera à l’ordre du jour des débats de la Fête de l’Humanité.

 

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