Je viens d’apprendre la mort de mon plus ancien ami et camarade, Arnaud Spire. Je suis consterné et infiniment triste. Et des pages entières de souvenirs affluent dans ma tête et dans mon cœur.
J’ai connu Arnaud dans les années 1970, il habitait alors à Aubervilliers
où il était secrétaire de section du parti. C’est là que j’ai appris qu’il
avait un passé de résistant au colonialisme en Algérie. Il fut membre du parti
communiste algérien, journaliste à Alger Républicain jusqu’à l’interdiction du
journal et militant clandestin ensuite. Il fut d’ailleurs emprisonné et torturé
par les sbires de Boumediene, avant d’être libéré à la suite d’une campagne du
Secours populaire. De retour en France il enseigna la philosophie dans
l’enseignement privé et il créa d’ailleurs le syndicat CGT de l’enseignement
privé, ce qui lui valut d’être mis à la porte du cours où il était professeur.
C’est à ce moment que je fis sa connaissance. Nous étions très attachés à
l’éducation des militants communistes, au sein de la fédération du
« 9-3 ». Puis nous avons agi au sein de l’université nouvelle, en
enseignant la philo marxiste à Paris d’abord, puis dans des comités d’entreprise
de banlieue populaire, avant de rejoindre les intervenants réguliers de l’école
centrale du PCF. Arnaud travailla d’abord à la Nouvelle critique dont il fut le
secrétaire général, puis avec Jean-Paul Jouary, il dirigea les pages idées de
l’Humanité. Je le vois encore animer les séances de rencontres de ces journaux
au Festival d’Avignon avec passion, avant d’aller – c’était un gastronome –
déguster quelques merveilles à l’Ousteau de Beaumanière !
Il écrivit de nombreux livres et m’invita à participer au premier d’entre
eux : Giscard et les idées. Il eut la grande gentillesse de m’en dédier
l’écriture de quelques autres… Il faut dire que nous dialoguions très fort,
tout en étant toujours d’accord sur le fond et l’essentiel : le communisme
comme combat à mener au présent, et non comme une société idéale lointaine et
une sorte de paradis merveilleux.
Arnaud avait la passion de convaincre et possédait pour cela une immense
culture. Il savait mettre tout son savoir à la portée des militants ouvriers
qui l’écoutaient avec ardeur. Il a laissé un excellent souvenir aux
« élèves » des écoles du parti : il avait l’art de savoir
prendre des exemples simples et convaincants qui restaient dans les mémoires de
qui l’avait entendu. Il était surtout d’une formidable gentillesse et d’une
grande efficacité pratique…
Mais je suis trop peiné
de sa disparition pour en dire davantage. Je préfère garder ma grande tristesse
pour moi et ma femme Sylvie. Je pense bien sûr à ses compagnes et à ses
enfants. Je les embrasse avec de tendres souvenirs.
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