jeudi 22 avril 2021

« Après nous le déluge », l’éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité.



En toute hâte, mercredi, l’Union européenne a adopté un accord prévoyant une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Il était moins cinq pour faire bonne figure à l’occasion du sommet voulu par Joe Biden en ce Jour de la Terre. Ce dernier, après les quatre années Trump de déni face au défi climatique, a beaucoup à faire en balayant devant sa porte, mais nous sommes loin du compte. L’engagement européen tout frais, 57% au mieux quand les experts tablent sur 65% au minimum, n’est pas encore à la hauteur de l’enjeu et, que ce soit aux États-Unis, ici et dans le reste du monde, pendant les travaux, la mise à sac de la Terre continue. L’année 2020 a été l’une des plus chaudes depuis des décennies, les météorologues estiment à 10 millions le nombre de personnes déplacées en raison des changements climatiques.

En France, on sait le sort réservé à la convention citoyenne « nettoyée » de ses propositions essentielles. Ce n’est pas tout. Les banques françaises n’en ont pas fini, au contraire, avec le financement des énergies fossiles. Au travers de leurs investissements, toujours en hausse, elles sont responsables de l’émission de plus de 2 millions de tonnes de Co2, soit plus de quatre fois le total des émissions de la France elle-même. Ce n’est qu’un exemple.

Au-delà, il y a autour du climat un véritable tabou. La Terre ne brûle pas partout de la même manière. Les 1 % les plus riches produisent deux fois plus de Co2 que la moitié la plus pauvre des locataires de la planète. Comment ne pas remarquer ici que l’industrie du luxe, à la pointe de la surconsommation, est aussi à la pointe des profits, pour le bonheur de ses propriétaires ultramilliardaires. On peut noter à ce propos que l’industrie de la mode est une des plus polluantes dans le monde, pendant qu’on demande aux pauvres de ne pas jeter les sacs en plastique de leur misérable viatique. Après nous le déluge, disait Louis XV. Le déluge et le désert, c’est maintenant, mais pas pour tout le monde.

 

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