Dans les territoires occupés, les camions israéliens
viennent livrer les vaccins pour les colons. Des associations réclament le
respect des conventions de Genève.
Pour Benyamin Netanyahou, l’enjeu de la
vaccination contre le Covid-19 est d’abord et avant tout politique. Les
élections générales doivent avoir lieu au mois de mars et il veut qu’à ce
moment-là le pays, remonté contre les dirigeants politiques accusés d’une
mauvaise gestion de la crise, ait retrouvé un semblant de normalité. Pour cela,
il est prêt à tout. Y compris à payer 62 dollars la dose
(50,54 euros), contre 19,50 dollars payés par les États-Unis, comme
l’a révélé le ministère israélien de la Santé. Pour le premier ministre,
pouvoir annoncer qu’Israël est le premier pays au monde à sortir de la pandémie
vaut toutes les publicités électorales. Mais si, en début de semaine, Tel-Aviv
se vantait d’avoir déjà vacciné 1,3 million de personnes (objectif de
cette campagne commencée le 19 décembre, 2 millions de doubles
vaccinations d’ici à la la fin janvier), l’annonce, mardi matin, que des
patients nouvellement infectés venaient de recevoir leur première injection a
jeté un froid et amené le ministre de la Santé à demander un reconfinement
total.
Près de 100 000 cas de contamination en Cisjordanie
Pour les millions de Palestiniens qui
vivent sous contrôle israélien en Cisjordanie occupée et à Gaza, en revanche, aucun
changement. Les autorités palestiniennes ont officiellement recensé près de
100 000 cas de contamination en Cisjordanie, pour plus d’un millier de décès. À
Gaza, environ 42 738 malades, dont près de 400 sont décédés, ont été
identifiés. Les camions israéliens sillonnent bien les routes de Cisjordanie
mais c’est pour aller livrer les vaccins dans les colonies. Des milliers de
colons en ont déjà bénéficié. Les Palestiniens, eux, devront attendre.
Peut-être des mois. « Nous avons reçu une lettre officielle de
l’Organisation mondiale de la santé (OMS) selon laquelle l’acheminement des
vaccins commencera le mois prochain afin de couvrir 20 % de la
population », a indiqué Yasser Bouzia, un responsable au ministère
palestinien de la Santé à Ramallah. Ces vaccins seront délivrés dans le cadre
du dispositif Covax, mis en place par l’organisation onusienne et l’Alliance
pour les vaccins (Gavi), qui rassemble environ 190 pays dont plus de 90 à
revenus faibles et intermédiaires. Salama Ma’rouf, chef du bureau de presse du
Hamas à Gaza, a estimé que les vaccins arriveraient « dans les deux
mois », ajoutant qu’il y a une coordination entre l’OMS et l’Autorité
palestinienne.
Des vaccins distribués aux frais de l’OMS
Pourtant, les vaccins destinés au Covax
n’ont pas encore obtenu l’approbation de l’institution pour une « utilisation
d’urgence », une condition préalable au début de la distribution. Gerald
Rockenschaub, le chef du bureau de l’OMS à Jérusalem, a parlé, lui, de « début
à mi-2021 » avant que les vaccins ne soient disponibles pour
distribution dans les territoires palestiniens.
Les vaccins prévus dans le cadre du dispositif Covax
seraient distribués aux frais de l’OMS et le reste de la population serait pris
en charge sur le budget de l’Autorité palestinienne ou grâce à des pays
donateurs. Israël peut se frotter les mains. Une dizaine d’organisations
humanitaires israéliennes et palestiniennes (dont Physicians for Human
Rights-Israel, The Palestinian Center for Human Rights ou encore Adalah)
exhortent « les autorités israéliennes à honorer leurs obligations
légales et à veiller à ce que des vaccins de qualité soient fournis aux
Palestiniens vivant sous l’occupation et le contrôle israéliens en Cisjordanie
et dans la bande de Gaza ». Elles soulignent que « l’article 56
de la 4e Convention de Genève prévoit expressément qu’un occupant a le devoir
d’assurer l’adoption et l’application des mesures prophylactiques et
préventives nécessaires pour lutter contre la propagation des maladies
contagieuses et des épidémies ». Ce droit comprend le soutien à l’achat et à la
distribution de vaccins à la population palestinienne sous son contrôle. Et les
organisations signataires de préciser : « Les autorités israéliennes ne
doivent pas déduire les coûts du vaccin des recettes fiscales qu’elles
perçoivent au nom de l’Autorité palestinienne. » Reste que des
milliers de Palestiniens, non vaccinés, continueront à aller travailler en
Israël et dans les colonies…
L’incertain programme covax
Si
Israël peut se permettre d’acheter 62 dollars une dose de vaccin, ce n’est
pas le cas des Palestiniens. Ils dépendent du programme Covax. Celui-ci est le
principal programme mondial de vaccination des populations des pays pauvres et
à revenu intermédiaire contre le coronavirus. Il vise à fournir au moins
2 milliards de doses de vaccin d’ici à la fin de 2021 pour couvrir
20 % des personnes les plus vulnérables dans 91 pays, en Afrique, en Asie
et en Amérique latine. Mais ce programme connaît déjà un manque de fonds, ce
qui pourrait rendre impossible la réalisation de ses objectifs.
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