mardi 14 avril 2020

Crise sanitaire : « l’Allemagne et la France » ?



On dira sans doute que comparaison n’est pas raison. Pourtant quelques chiffres interrogent. Pour un nombre de cas du coronavirus identique dans les deux pays, en Allemagne on compte 3000 morts, et 15 000 en France. Le nombre d’habitants s’élève à 80 millions en Allemagne et 67 millions en France. Notons que la population est vieillissante en Allemagne, ce qui devrait être un phénomène aggravant dans la mortalité liée au virus. levons tout de suite une ambiguïté, si elle devait exister. Dans ces deux pays ce sont les logiques du capital et du profit qui sont à l’œuvre. Pourtant, il est nécessaire de s’y attarder un instant.


DEUX STRATÉGIES SANITAIRES DIFFÉRENTES
En Allemagne, le pays a commencé très tôt à faire tester ses habitants. Dès la mi-janvier, en Bavière, une politique massive de dépistage a été mise en place. Le pays s’est appuyé pour cela sur les laboratoires disséminés sur le territoire. Dans un premier temps, chaque semaine 300 000 à 500 000 personnes sont testées. Et le gouvernement ne s’est pas arrêté là. Sa stratégie prescrite a été de réaliser pas moins de 200 000 tests par jour. « N’importe qui testé positif se retrouvait strictement confiné ». En France, le 24 mars, le ministre de la Santé et des Solidarités, Olivier VERAN, affirmait vouloir parvenir à 30 000 tests quotidiens. Puis, disait-il ce chiffre devrait être porté à 50 000 fin avril, 60 000 en mai et 100 000 en juin. Soyons clairs : « Le dé-confinement est inenvisageable sans un dépistage MASSIF. Les propos tenus hier par le président de la République sont, de ce point de vue, loin d’être rassurants.


Par ailleurs, jamais les hôpitaux allemands ne se sont trouvés saturés. À tel point, que plusieurs dizaines de malades de la région Grand Est ont été transférées vers les hôpitaux des régions frontalières. En Allemagne, 25 000 lits sont équipés d’une assistance respiratoire, soit 6 lits pour mille habitants. La France,  quant à elle, compte 3 lits pour mille habitants. Et est-ce étonnant de constater que l’Italie en compte 2,6 pour mille habitants, 2,4 pour l’Espagne et les États-Unis et 2,1 pour le Royaume-Uni. Quant au financement de la recherche et du développement en France, il est risible par rapport à l’Allemagne. Bien entendu, il convient de ne pas en rester au constat, et tenter d’en comprendre les raisons.


Les raisons sont nombreuses, mais il en est une essentielle. Ces trente dernières années toutes les politiques menées ont contribué à laminer l’industrie française, dont la part dans l’économie du pays a fondu de moitié depuis 1970. Près de 1,5 millions d’emplois ont été détruits au cours des 25 dernières années. La crise actuelle souligne la perte de souveraineté dans des secteurs aussi décisifs que la santé. Pendant qu’en Allemagne, l’industriel BOSCH a su développer un test ultra rapide, que les fabricants de respirateurs Draeger et Löwenstein ont tourné à plein régime, multipliant par deux leurs capacités de production, accompagnant même la demande venant d’Asie, notre pays a tenté de faire face avec les moyens du bord. L’industrie, c’est en effet, la grande question, le grand enjeu auquel notre pays doit faire face. Cela implique évidemment de rompre totalement avec les politiques actuelles. C’est un fait, contrairement à la France, l’Allemagne a su préserver une certaine indépendance industrielle.


Et voici, en pleine crise, Emmanuel Macron, déclarant à Angers : « nous devons rebâtir notre souveraineté nationale et européenne ». Mais les mots seront bien insuffisants pour rebâtir une stratégie industrielle. D’autant que ces trois dernières années, il s’est inscrit dans le droit fil des politiques de ses prédécesseurs (Cice, baisse des cotisations des grandes entreprises, réduction de l’impôt sur les sociétés), tout en les encourageant à conquérir de nouvelles parts de marchés à l’international. Ce revirement dans son langage ne fera pas oublier son choix de se désengager du capital d’industries stratégiques, comme Alstom ou Aéroports De Paris (ADP). Le temps est venu de définir les filières stratégiques et les secteurs sur lesquels l’investissement public doit porter, en un mot de changer résolument de cap. Il y a là un combat essentiel à engager. La soudaine métamorphose d’Emmanuel Macron « en ennemi de la finance mondialisée » ne restera que des mots, sans l’intervention consciente du monde du travail et de la création.



2 commentaires:

  1. Excellent cet article qui remet les choses en place. il y a d'autres dimensions, entre autre la part consacrée à la recherche et développement en Allemagne et qui a des implications sur son appareil industriel.La part de l'industrie,en Allemagne , pour le PID est d'environ 23 % alors qu'ici,il est de 11%. De l'OCDE,nous sommes dépassés, dans le mauvais sens, par Chypre, Malte,la Grèce et à égalité avec le Royaume-Uni...

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  2. Pour les chiffres qui diffèrent des vôtres, je me réfère de mémoire à 2018. De toute manière l'écart indiqué dans votre graphique est révélateur.

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